Dispense de rapport de gestion et information des délais de paiement des fournisseurs et clients et des revenus distribués (L. 441-6-1, L. 232-1, 243 bis )

Question pratique : comment combiner la réforme qui dispense les petites entreprises d’établir un rapport de gestion (article L. 232-1, IV du code de commerce) avec l’obligation de présenter dans le rapport de gestion les délais de paiement des fournisseurs et des clients (articles L. 441-6-1 devenu L. 441-14 , D. 441-4 , A. 441-2 et annexe 4-1 du code de commerce) et le montant des revenus distribués (article 243 bis du code général des impôts).

Réponse : la Compagnie nationale des commissaires aux comptes a considéré que les informations sur les délais de paiement n’ont pas à être communiquées (étude juridique 2018-90 publiée le 10 mai 2019).

Pour notre part, nous avions considéré que, dans l’attente d’une position, il fallait, selon nous, établir pour l’obligation d’information des délais de paiement des fournisseurs et des clients, un document de présentation spécial aux actionnaires ou associés de la société. En revanche, il n’en irait pas de même pour la mention du montant des revenus qui ont été mis en distribution au cours des trois exercices précédents, cette mention devant figurer en tout état de cause dans les résolutions des actionnaires ou les décisions des associés ces derniers étant alors parfaitement informés.

Voir aussi notre article Les Assemblées (actionnaires, masse de porteurs d'obligations, OC, OCA, etc.) pendant l'état d'urgence sanitaire (Covid-19) et les règles de confinement (SARL, SA, SAS, etc.).

Explications : l’obligation de présenter dans le rapport de gestion les délais de paiement des fournisseurs et des clients résulte d’un texte réglementaire. On pourrait considérer que la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 qui a modifié l’article L. 232-1 du code de commerce, dispensant les petites entreprises d’établir un rapport de gestion, a rendu “caduc” le texte réglementaire. Toutefois, l’article L. 441-6-1 dispose que “Les sociétés dont les comptes annuels sont certifiés par un commissaire aux comptes communiquent des informations sur les délais de paiement de leurs fournisseurs et de leurs clients suivant des modalités définies par décret”. Une communication est donc prévue par la loi. Le décret est-il une condition d’application de cette obligation légale (pour une présentation de la question, voir le guide de légistique établit par le secrétariat général du Gouvernement) ? En effet, l’article 1 du code civil dispose que “Toutefois, l'entrée en vigueur de celles de leurs dispositions dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures”. Mais le guide de légistique précité nous indique également que “si les dispositions de la loi ou du règlement sont suffisamment précises pour être immédiatement appliquées, elles entreront en vigueur alors même que cette loi, ou ce règlement, renverrait à des mesures d’application non encore adoptées”. Or, il nous semble que la loi mentionne que des informations doivent être communiquées, seules les modalités de cette communication étant déterminées par un règlement. Par ailleurs, le commissaire aux comptes est tenu d’établir une “attestation”. Or, en l’absence de communication le commissaire aux comptes ne pourrait exécuter ses obligations légales. Pour toutes ces raisons, il nous semble préférable de prévoir, en l’absence de rapport de gestion, une communication spéciale sur les délais de paiement des fournisseurs et des clients.

La problématique nous parait différente pour l’article 243 bis du code général des impôts qui, rappelons-le, dispose que : “Les rapports présentés et les propositions de résolution soumises aux assemblées générales d'associés ou d'actionnaires en vue de l'affectation des résultats de chaque exercice, doivent mentionner le montant des dividendes qui ont été mis en distribution au titre des trois exercices précédents, le montant des revenus distribués au titre de ces mêmes exercices éligibles à l'abattement de 40 % mentionné au 2° du 3 de l'article 158 ainsi que celui des revenus distribués non éligibles à cet abattement, ventilés par catégorie d'actions ou de parts.” Dans la mesure où le montant est mentionné dans les résolutions des actionnaires ou les décisions des associés, l’obligation d’information nous semble avoir été respectée.

Matthieu Vincent

Avocat au barreau de Paris