Obligations, obligations convertibles : les associés doivent-ils statuer sur la vérification de l'actif et du passif ?

Question d’un client : les associés ou actionnaires doivent-ils statuer sur le rapport du commissaire à la vérification de l’actif et du passif qui serait requis préalablement à l’émission d’un emprunt obligataire ou d’obligations convertibles ou remboursables ?

Réponse : depuis l’ordonnance du 10 mai 2017, les associés ou actionnaires n’ont pas à statuer sur le rapport.

Explications : lorsqu’une société veut émettre des obligations (sèches, convertibles ou remboursables) mais que ses associés ou actionnaires n’ont pas régulièrement approuvé au moins deux bilans, une telle émission doit être précédée d’une vérification de l’actif et du passif de la société par un commissaire (article L. 228-39 du code de commerce).

Auparavant, la procédure de vérification de l’actif et du passif renvoyait à la procédure de vérification des apports en nature et des avantages particuliers (ancienne version de l’article L. 228-39 du code de commerce qui renvoyait à l’article L. 225-8 du même code). Or, cette procédure nécessitait de statuer sur le rapport du commissaire (L. 225-8). La procédure a été modifiée par l’article 2 de l’ ordonnance n° 2017-970 du 10 mai 2017 tendant à favoriser le développement des émissions obligataires (qui n’a pas encore été ratifiée à la date de la présente publication, mais dont le projet de loi de ratification a bien été déposé dans les 3 mois de la publication de l’ordonnance conformément à l’article 114 de la loi d’habilitation n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique). L’ordonnance n’a donc pour l’instant qu’une valeur réglementaire et peut être contestée devant les juridictions administratives.

Il est évident que les auteurs de l’ordonnance ont souhaité écarter l’ancienne procédure de vérification des apports en nature et des avantages particuliers et prévoir une nouvelle procédure spécifique qu’ils ont détaillée dans la nouvelle rédaction de l’article L. 228-39 du code de commerce. Contrairement à d’autres textes qui utilisent le terme « soumis », la nouvelle rédaction ne précise pas « à l’approbation » (voir par exemple articles L. 221-7, L. 223-19, L. 223-26, L. 225-37-2 du code de commerce). On peut donc considérer que les associés ou actionnaires n’ont pas à « approuver » ou « statuer » sur le rapport. Ceci s’explique certainement (le rapport au Président de la République concernant l’ordonnance n° 2017-970 précitée n’apportant pas de précision sur ce point en explicitant l’article 2) par le fait que le rapport du commissaire n’est pas nécessairement soumis aux associés ou actionnaires mais peut l’être au président ou directeur général, par exemple, qui peut en effet être (L 228-40) pour les émissions obligataires sèches, l’« organe de la société ayant qualité pour décider ou autoriser l'émission d'obligations ». Or, le président ou le directeur général, agissant unilatéralement, n’a pas à approuver ou statuer sur le rapport pour émettre les obligations. Il s’agirait donc d’un régime spécifique unifié à tous les organes de la société ayant qualité pour décider ou autoriser une émission obligataire quelle que soit sa forme.

Matthieu Vincent

Avocat au barreau de Paris