Prompts d’IA : des écrits saisissables lors des mesures d’instruction et des visites Autorité de la Concurrence et DGCCRF

Les historiques de prompts et de chats avec des IA génératives constituent des écrits électroniques, et plus largement des supports d’information, susceptibles d’entrer dans le périmètre des pièces pouvant être appréhendées :

(i) lors de mesures d’instruction in futurum ordonnées sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile (CPC), sur requête (non contradictoire si les circonstances l’exigent) ou en référé (contradictoire) ;

(ii) lors des opérations de visite et saisie (OVS, « dawn raids ») en matière de concurrence et de protection économique des consommateurs, conduites par l’Autorité de la concurrence ou la DGCCRF sur autorisation du juge des libertés et de la détention (JLD), avec saisie de « documents et de tout support d’information (…) détenus, accessibles ou disponibles » depuis les lieux visités (messageries, interfaces web, espaces cloud accessibles via un poste de travail, etc.).

En pratique, la collecte s’opère soit au moyen de recherches ciblées dans les espaces numériques (puis tri et sélection des seuls éléments utiles), soit par des copies plus larges (boîtes mail, espaces de travail, dossiers partagés) suivies d’un filtrage ultérieur sous contrôle judiciaire.

En droit de la concurrence, les autorités recourent classiquement à des outils informatiques de fouille (recherches par expressions/logiques booléennes, imagerie, tri) pour parcourir les données accessibles sur site.

Les historiques de chat avec un chatbot, dès lors qu’ils sont accessibles depuis un poste ou un espace de travail situé sur les lieux des opérations, ne sont donc pas exclus de ce périmètre : ils se fondent dans la masse des données susceptibles d’être consultées et copiées.

Or ces historiques de prompts présentent une forte exposition probatoire dès lors :

  • qu’ils sont horodatés, regroupés par conversation ou par sujet, riches en contexte, et reflètent souvent les intentions, raisonnements et itérations (ex. : préparation d’une politique tarifaire, d’une campagne promotionnelle, d’une stratégie d’écoulement de stocks) ;

  • qu’ils sont facilement localisables depuis un poste ou un espace de travail et directement exploitables lors d’une saisie.

Les grands principes de protection demeurent : motif légitime, nécessité et proportionnalité de la mesure (y compris ciblage et tri), respect du secret des affaires (hors enquêtes ou décision de justice), protection des données personnelles, secret professionnel de l’avocat lorsque le contenu reproduit des échanges avocat‑client, et contrôle judiciaire du déroulement des opérations.

En pratique, toutefois, à la différence d’autres supports plus aisément identifiables ou classés comme sensibles, les prompts ne font l’objet d’aucun marquage spécifique et se fondent dans la masse des données appréhendées. Cela renforce l’intérêt d’anticiper en interne la manière dont ces outils sont utilisés, les informations qui y sont injectées et les modalités de conservation de leurs historiques.

Chloé Zylberbogen

Avocate au barreau de Paris