Acte sous signature privée signé par signature électronique : l'apposition d'un paraphe et d'une signature est-elle nécessaire (C. civ., 1367, D. 71-941) ?

Certaines solutions de signature électronique proposent aux parties d’apposer un facsimile de paraphe sur chaque page et ou de signature sur un acte signé électroniquement. Certains clients nous demandent régulièrement s’il est nécessaire de faire apposer par les parties un paraphe et/ou une signature sur un acte sous signature électronique ?

Rappelons que l’on distingue en droit français les actes authentiques (1369) comme l’acte notarié par exemple et les actes sous signature privée (1372).

LE PARAPHE

Le paraphe n’est exigé que pour les actes notariés à peine de nullité (art. 14 du décret n° 71-941), sauf pour les pages d’annexe (Cour de cassation, 16 novembre 2007, n° 03-14.409) ou si les pages sont réunies par un procédé empêchant toute substitution ou addition (art. 14 précité).

Pour les actes sous signature privée, rien de tel. La Cour de cassation a ainsi rappelé que “en-dehors des exceptions prévues par la loi, l'acte sous [signature privée] n'est soumis à aucune autre condition de forme que la signature de ceux qui s'obligent” (Cour de Cassation, 27 janvier 1993, n° 91-12.115). Pourquoi alors faire parapher chaque feuille ? Si le paraphe est utilisé, c’est pour se constituer la preuve du nombre de pages d’un acte réalisé en plusieurs exemplaires, pour prouver que chaque exemplaire signé par les parties comporte le même nombre de feuilles, autrement dit qu’aucune page n’ait été supprimée ou ajoutée sur un exemplaire signé par les parties.

Pour les actes signés électroniquement, ce risque n’existe plus puisque le document à signer est en un seul et unique exemplaire, chaque partie ayant la possibilité de télécharger cette unique exemplaire, l’acte ainsi téléchargé constituant un original (voir notre article).

Il est donc inutile d’apposer un facsimile de paraphe sur l’acte (d’autant que ce facsimile est souvent créé de toutes pièces par la plateforme de signature). Pour preuve, alors que nous venons de voir que le paraphe est une condition de validité pour un acte notarié, il n’est plus exigé pour les actes notariés signés électroniquement (art. 19 du décret n° 71-941).

LA SIGNATURE

La signature électronique est un “procédé” technique (1367). Dès lors, ce qui compte est la fiabilité du procédé, c’est-à-dire “lorsque la signature électronique est créée, l'identité du signataire assurée et l'intégrité de l'acte garantie” (1367 précité). Une signature électronique n’est donc pas la reproduction de la signature manuscrite d’une personne.

Ainsi, pour les actes sous signature privée signé électroniquement, il n’est pas nécessaire d’apposer un facsimile de signature (parfois créé de toutes pièces par la plateforme de signature électronique) ou d’incruster une image de la signature manuscrite. Il est parfois déroutant de voir un acte électronique sans facsimile de signature, il n’en reste pas moins que le défaut d’un tel facsimile ou image n’a aucun effets sur la fiabilité du procédé et donc sa validité.

Toutefois, en matière d’acte notarié électronique, les textes précisent que l’image de la signature manuscrite des parties (ou des témoins) doit être apposée (art. 19 du décret n° 71-941).

Matthieu Vincent

Avocat au barreau de Paris