La responsabilité in solidum

La responsabilité in solidum ne doit pas se confondre avec la solidarité. La première n’est prévue par aucun texte, elle résulte d’une création jurisprudentielle (Cour de cassation, 4 décembre 1939, DC 1941, p. 124 ; 25 juin 1970, n° 69-11.014 ; 3 février 1983, n° 81-16.481 ; 12 janvier 1984, n° 82-14.346 ; 9 décembre 2021, n° 19-22.217 ; Tribunal des conflits, 14 février 2000, n° 02929) alors que la seconde est visée par les dispositions des articles 1310 et suivants du code civil.

Selon le principe de la responsabilité in solidum, chacun des coauteurs d'un même dommage, conséquence de leurs fautes respectives, doit être condamné in solidum à la réparation de l'entier dommage, chacune de ces fautes ayant concouru à le causer tout entier, sans qu'il y ait lieu de tenir compte du partage de responsabilités entre les coauteurs, lequel n'affecte que les rapports réciproques de ces derniers, mais non le caractère et l'étendue de leur obligation à l'égard de la victime du dommage.

Cela signifie que chaque coauteur est condamné pour le tout (Cour de cassation, 9 avril 2014, n° 13-13.414) peu importe si un ou plusieurs des coauteurs ne sont pas connus (Cour de Cassation, 29 avril 1970, n° 68-13.592) ou que l’action contre les autres coauteurs soit prescrite (Cour de cassation, 5 juillet 2000, n° 98-20.914 et 98-21.634) ou empêchée (Cour de cassation, 31 mai 1978, n° 76-15.620). Comme en matière de solidarité, la victime peut alors agir en paiement pour la totalité conte l’un des coauteurs seulement, sans être obligée d’agir contre les autres et sans être tenu par la répartition qui aurai été faite par le tribunal entre les coauteurs (Cour de cassation, 5 décembre 1984, n° 82-16.212).

Celui ou ceux qui ont payé ont alors un recours contre les autres coauteurs (Cour de cassation, 5 octobre 2006, n° 05-16.514 ; 11 janvier 2000, n° 97-16.605 ; 17 avril 2008, n° 07-16.824 ; 1er juin 2011, n° 10-20.036 ; 22 novembre 2017, n° 16-19.867). Etant placés dans la situation de la victime, celui ou ceux qui ont payé peuvent se voir opposer les mêmes exceptions que celles de la victime telles sa renonciation ou la prescription (Cour de cassation, 22 octobre 1975, n° 74-11.488 ; 4 février 2003, n° 99-15.717 ; contra 1 mars 2014, n° 12-35.334 et 13-10.992). La prescription de l’action court à compter de l’assignation délivrée au premier coauteur (Cour de cassation, 13 octobre 2015, n° 14.10-664 ; 4 octobre 2018, n° 17-26.931) même en référé (Cour de cassation, 16 janvier 2020, pourvoi n° 18-25.915), sauf vis-à-vis des éventuels coauteurs non encore identifiables (Cour de cassation, 19 juillet 2024, n° 22-18.729).

La responsabilité in solidum n’est pas d’ordre public et peut être exclue dans un contrat (Cour de cassation, 19 mars 2013, n° 11-25.266 ; 19 janvier 2022, n° 20-15.376) sous réserve des règles d’exclusion vis-à-vis des consommateurs.

Matthieu Vincent

Avocat au barreau de Paris